Quand le manager ne parle pas, tout le monde interprète

Le coût caché du silence managérial dans les équipes

Le silence d’un manager n’est jamais neutre. Il est ressenti, interprété, amplifié. En évitant un retour, en fuyant un sujet ou en “oubliant” de parler, le manager ouvre la porte à des hypothèses souvent négatives. Ce silence fragilise les liens, la performance, la confiance. Ce premier article de la semaine explore l’impact de ce non-dit, bien plus bruyant qu’il n’y paraît.

Quand le manager ne parle pas, tout le monde interprète

Le silence managérial : un signal fort malgré lui

« Le silence d’un manager n’est jamais vide : il est toujours porteur de sens, même involontairement. » — François Dupuy, sociologue des organisations [1].

Le silence n’est jamais neutre en management. Il peut être volontaire (stratégie d’évitement, peur du conflit) ou involontaire (manque de temps, d’habitude). Quelle que soit son origine, il crée un vide informationnel que les collaborateurs cherchent naturellement à combler. Ce vide devient un terreau fertile pour les rumeurs, les hypothèses erronées et les malentendus [2].

À noter : le silence n’est pas toujours négatif. Utilisé à bon escient, il peut permettre la réflexion ou favoriser l’écoute active. Mais lorsqu’il devient une habitude ou un évitement, il devient toxique pour la dynamique collective [3].

Le silence à l’ère du management à distance ou hybride

Le développement du télétravail et des modes hybrides a profondément modifié la perception du silence managérial. À distance, l’absence de réaction ou de feedback immédiat est souvent vécue comme un désintérêt ou un manque de considération. Les collaborateurs, privés des signaux non verbaux et des échanges informels, interprètent plus facilement le silence comme une forme de retrait, voire de désengagement. Cela peut renforcer le sentiment d’isolement, la démotivation et la perte de repères au sein de l’équipe. Dans ce contexte, il devient essentiel pour le manager d’instaurer des rituels de communication réguliers, même brefs, pour maintenir la confiance et la cohésion [4].

Conséquences du silence sur la dynamique d’équipe

Perte de confiance et de sens

Le silence génère un climat d’incertitude qui fragilise la confiance envers le manager et l’organisation. Les collaborateurs peuvent se sentir délaissés, non reconnus ou ignorés, ce qui affecte leur engagement et leur motivation [5].

Multiplication des interprétations et des rumeurs

En l’absence d’informations claires, les membres de l’équipe construisent leurs propres récits pour expliquer le silence. Ces interprétations sont souvent négatives, alimentant méfiance et tensions internes [2].

Impact sur la performance et le bien-être

Le silence managérial peut provoquer du stress, du désengagement, voire des comportements contre-productifs. À terme, cela se traduit par une baisse de la performance collective, une augmentation du turnover et des risques psychosociaux accrus [6].

Statistique clé : Selon une étude Gallup, 51 % des salariés français se disent désengagés au travail, un phénomène souvent lié à un manque de communication et de reconnaissance managériale [6].

Exemple concret : Lors d’une réorganisation, un manager choisit de ne pas informer son équipe des changements à venir, pensant les protéger de l’incertitude. Résultat : les rumeurs circulent, la méfiance s’installe, et plusieurs collaborateurs envisagent de quitter l’entreprise, faute de visibilité sur leur avenir [5].

Pourquoi le silence coûte cher à l’entreprise

  • Perte d’agilité : des équipes moins informées sont moins réactives face aux changements.

  • Difficultés à anticiper les problèmes : sans communication, les signaux faibles passent inaperçus.

  • Dégradation de la qualité des décisions : les décisions fondées sur des hypothèses erronées ou incomplètes sont moins efficaces [5].

Comment prévenir et réduire le silence managérial

  • Instaurer une communication régulière et transparente : même un message simple est préférable à un silence prolongé.

  • Encourager le feedback bidirectionnel : le manager doit aussi savoir écouter les signaux faibles de ses collaborateurs [3].

  • Former les managers à la communication claire : oser dire les choses simplement renforce la confiance et la lisibilité de l’action [5].

Conclusion

Le silence managérial n’est pas une absence de communication, mais un message en soi – souvent mal interprété. Pour construire une relation managériale saine, la parole ne doit pas être une option, mais une responsabilité. Nommer, clarifier, expliquer : autant d’actes de présence qui créent la sécurité relationnelle indispensable à la performance durable.

À retenir

  • Le silence d’un manager est toujours interprété, souvent négativement

  • Il fragilise la confiance, alimente les tensions et diminue l’agilité collective

  • Les effets du silence managérial peuvent se traduire en coûts humains et organisationnels

  • Oser la parole claire, même imparfaite, est une compétence managériale essentielle

Sources & références

  1. Dupuy, F. (2011). Lost in Management : La vie quotidienne des entreprises au XXIe siècle. Analyse de la complexité managériale contemporaine. Lire l’article
  2. Parlons RH (2020). Ce que disent les « silences organisationnels » de votre entreprise. Exploration des impacts des non-dits sur la performance et la culture d’entreprise. Lire l’article
  3. Icsi (2025). Comment lutter contre le silence organisationnel ? Recommandations pour une culture d’expression et de prévention. Lire l’article
  4. Le Monde (2024). « Osez le télétravail ! » : Les manageurs face aux enjeux du travail à distance. Analyse des défis de la communication managériale à distance. Lire l’article
  5. Michael Page (2024). Management : de l’importance de la communication managériale. Bonnes pratiques pour instaurer un dialogue constant avec son équipe. Lire l’article
  6. Gallup (2023). State of the Global Workplace. Rapport mondial sur l’engagement et les attentes des salariés. Lire l’article

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