Le retour en force d’un management qui écoute

Le terme de management humaniste séduit. Il rassure, il inspire, il rassemble. Mais que recouvre-t-il exactement ? Et surtout, comment s’assurer que cette promesse d’un management “centré sur l’humain” ne reste pas une façade ?

Cet article propose un éclairage rigoureux sur les fondements, les leviers et les ambiguïtés du management humaniste, à l’heure où engagement, autonomie et quête de sens deviennent des impératifs autant que des défis.

Le retour en force d’un management qui écoute

Le retour d’un management qui écoute

Longtemps relégué à la marge, le management humaniste connaît un regain d’intérêt.

Dans un monde du travail traversé par la fatigue relationnelle, la crise du sens et la défiance envers l’autorité, il apparaît comme une voie possible pour restaurer la confiance.

Mais derrière cette tendance, il y a plus qu’un effet de mode. Il s’agit d’une réponse à une lassitude collective : celle d’un management perçu comme distant, vertical, voire infantilisant.

Le management humaniste se pose comme un contre-modèle, plus horizontal, plus incarné, plus responsabilisant, et surtout porteur de sens partagé [1].

Un concept exigeant, souvent mal compris

  • Par “management humaniste”, on entend trop souvent une simple posture de bienveillance ou de “gentillesse”. Or, l’enjeu est bien plus profond : il s’agit d’un changement de paradigme.

    Le management humaniste repose sur quatre piliers structurants :

    • Donner du sens : relier les tâches aux finalités, expliciter la vision, nourrir l’utilité sociale du travail.

    • Reconnaître : valoriser les efforts, le progrès, l’engagement – pas seulement les résultats.

    • Faire preuve de cohérence et de transparence : assumer ses décisions, dire ce qu’on fait, faire ce qu’on dit, reconnaître ses erreurs.

    • Faire confiance a priori : accorder de l’autonomie, ne pas présupposer l’irresponsabilité [1].

    Le management humaniste n’est pas “soft” : il est exigeant, car il suppose alignement, stabilité émotionnelle, courage managérial et capacité à accueillir les tensions sans les fuir [2].

Ce que disent les chiffres

  • Les recherches récentes confirment l’intérêt croissant pour cette approche :

    • 70 % de l’engagement des salariés dépend de la qualité de leur relation managériale [3].

    • 46 % des salariés se déclarent en état d’épuisement professionnel avancé [3].

    • Les entreprises qui valorisent leur capital humain affichent une productivité supérieure de 25 %, une meilleure fidélisation et une capacité d’innovation accrue [4].

    Le lien est clair : un management aligné, responsable et à l’écoute n’est pas seulement bénéfique sur le plan humain — il est stratégiquement performant.

Le retour en force d’un management qui écoute

Le management humaniste en action : sincérité ou façade ?

Certaines entreprises françaises s’engagent concrètement vers un management plus responsabilisant, centré sur l’écoute, la confiance et le sens du collectif.

  • Michelin a mis en place une organisation responsabilisante dans plusieurs de ses usines. À Roanne, par exemple, les opérateurs cumulent des rôles de coordination en sécurité, qualité et planification, avec une autonomie forte sur les décisions quotidiennes, sans supervision directe permanente [5].

  • Le Groupe Hervé, spécialisé dans les services en efficacité énergétique, a supprimé la hiérarchie traditionnelle pour promouvoir des équipes auto-organisées. Chaque collaborateur est à la fois acteur et décideur dans son périmètre, dans une logique de subsidiarité et de responsabilisation [6].

  • Chez Gruau, entreprise industrielle familiale, la qualité participative et l’amélioration continue reposent sur une implication forte des salariés. Le dialogue transversal, la transmission et le sens de la mission sociale y sont structurants [7].

  • A5Sys, PME nantaise du numérique, a bâti sa culture managériale sur la reconnaissance, la transparence et la co-construction. Les collaborateurs participent aux décisions stratégiques, et l’écoute active fait partie intégrante des rituels d’équipe [8].

Mais attention au “façade management” : l’étiquette “humaniste” peut être brandie à des fins de communication sans transformation réelle.

On vante la confiance, mais on traque les horaires.

On célèbre l’écoute, mais on ignore les signaux faibles.

On affiche la bienveillance, mais on maintient des logiques de contrôle.

La dissonance entre discours et réalité fragilise la crédibilité du management, et peut générer cynisme, désengagement ou perte de confiance.

Méthode en lumière : DESC

La méthode DESC (Décrire – Exprimer – Suggérer – Conclure) est un outil précieux pour désamorcer les tensions tout en respectant l’autre [2].

Exemple :

« Quand tu interviens systématiquement après moi en réunion (Décrire), je me sens discrédité (Exprimer). Je te propose qu’on se coordonne en amont (Suggérer), qu’en penses-tu ? (Conclure) »

Cette méthode favorise la reconnaissance authentique, la transparence et la résolution constructive des tensions, en replaçant le dialogue au cœur du management.

Vers une entreprise comme communauté

Un management véritablement humaniste ne peut reposer uniquement sur la bonne volonté individuelle.

Il s’incarne dans un projet collectif, une culture partagée, une gouvernance éthique et une logique de co-responsabilité.

Cela implique aussi de reconnaître les efforts, d’accepter la vulnérabilité, de partager les décisions, d’assurer la diversité et l’équité, et de gérer les tensions de façon transparente.

Les entreprises humanistes rayonnent au-delà de leurs murs, créant de la valeur pour les clients, les partenaires et la société dans son ensemble.

Conclusion – Une exigence d’alignement

Le management humaniste n’est ni naïf, ni utopique.

Il est radical dans son exigence : considérer l’humain non comme un “capital” ou une “ressource”, mais comme un sujet, porteur de sens et d’initiative.

Cette exigence engage le manager dans sa posture, mais aussi toute l’organisation dans ses choix, ses priorités et ses arbitrages.

À l’ère de l’IA, de l’incertitude et de l’hybridation, ce modèle n’est pas seulement souhaitable…

Il devient incontournable.

À retenir

  • Le management humaniste repose sur le sens, la reconnaissance, la transparence et la confiance.

     

  • Il exige un alignement profond entre les valeurs affichées et les pratiques réelles.

     

  • Il est soutenu par des outils concrets (DESC, feedback, check-ins, cercles de parole).

     

  • Il s’incarne à l’échelle collective dans une gouvernance et une culture cohérentes.

     

  • Il crée de la valeur pour les équipes, les clients, les partenaires… et la société.

Sources & références

  1. Eurécia (2024). Management humain : principes et pratiques essentielles. Lien
  2. Formations Management (2024). Leadership humaniste exigeant. Lien
  3. Empreinte Humaine (2023). Baromètre du burn-out. Lien
  4. Journal du Net (2025). Management humain : redonner du sens au leadership. Lien
  5. Le Monde (2024). Michelin à la recherche de l’autonomie au travail. Lien
  6. Wikipédia (2024). Groupe Hervé. Lien
  7. Wikipédia (2024). Patrick Gruau. Lien
  8. Maville Nantes (2022). Bien-être au travail : A5Sys prône un management humaniste. Lien
  9.  

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